Alyssa,
était ce qu'on peut appeler un modèle
de vertu et d'habitudes strictes, éduquée la plus pure tradition
de sa famille .
Une famille qu'elle avait du d'ailleurs
quitter pour la première fois de sa vie en venant s'installer ici
. Bien sûr cela avait du créer beaucoup de remue-ménage
au sein de cette dernière. Il était dans la tradition que
les membres non mariés restent à demeure jusqu'à ce
que le père décide du mariage. Mais...elle avait craquée.
Poussée par son père dans les études, elle avait acquis
au fil des ans un métier bien rémunéré, et
un niveau social à la hauteur de ces efforts, aussi le pas le plus
difficile avait été de braver l'indéfectible autorité
paternelle.
Après tout elle avait bien eu une
tante qui avait fini ses jours seule ! Alors pourquoi ne pas goûter
aux joies de la liberté ! Bien sûr elle avait mis ça
sur le compte de la pression du travail et du fait qu'il lui fallait impérativement
une solitude et une tranquillité que l'entourage familiale aurait
du mal à supporter si elle restait . Le père en était
resté muet mais très digne et son départ s'était
fait sans aucune vague...
Dans la dignité et l'incompréhension
la plus totale...Bah ! Elle se l'était promis, elle leur enverrait
des nouvelles chaque semaine et puis 3 heures de train pour les rejoindre
ça n'était pas la mort quand même ! Bien sûr
elle savait que la famille, trahie, bafouée, ne ferait pas d'effort
pour la revoir, mais elle savait aussi qu'elle serait toujours accueillie
les bras ouverts à chaque visite...
Elle avait toujours été la
chouchoute de son père, et elle comptait bien la-dessus.
Elle y repensait encore alors qu'elle rangeait
ses affaires. Trois malles pleines à craquer ! Alyssa était
très ordonnée, à l'image du chignon qu'elle se faisait
chaque matin devant la glace de la salle de bains...Gestes répétés
sans aucun effort, sans conscience réelle, mécaniquement.
Tout était bien à sa place
comme d'habitude. L'endroit était différent et il avait fallu
s'accomoder des placards muraux . Mais surtout la maison avait besoin d'un
sérieux coup de balai et de chiffon !
Elle n'avait pas encore fait l'état
des lieux du jardin mais une fois l'intérieur terminé elle
s'y mettrait d'arrache-pieds !
Il lui fallu une semaine pour retaper de
façon correcte la maison, pendant ce temps-là elle fit aussi
connaissance avec son nouveau voisinage...le premier petit village était
à quelques dix kilomètres et le premier voisin, un fermier
très avenant, à cinq kilomètres.
Malgré les rangements, les travaux,
le ménage, elle trouvait toujours un peu de temps pour une promenade.
L'air pur et tonifiant de la mer lui faisait
beaucoup de bien. Il semblait lui redonner des forces et aussi apaiser
son sommeil . C'est fou ce qu'elle dormait profondément depuis qu'elle
était arrivée . Il faut dire aussi que le nettoyage
de la maison était éprouvant.
Certes la nature avait pourvu Alyssa d'une
taille exceptionnelle pour une femme, et sa volonté de fer ne la
faisait reculer devant rien pour arriver à ses buts. Mais néanmoins,
les journées était bien remplies, et les courbatures bien
présentes lors des soupers.
D'après ce qu'elle avait constaté,
la maison au bord de la falaise n'abritait pas de vie et le jardin entourant
la maison sur la falaise semblait être aussi peu entretenu que celui
de la nouvelle demeure d'Alyssa .Voire même encore plus en friche.
On distinguait à peine un chemin montant jusqu'à la grande
double porte de l'entrée... Les murs qui entouraient jadis le domaine,
n'étaient plus que ruines, et on pouvait distinguer ça et
là les restes rouillés d'une antique barrière. La
nature avait repris le dessus il y avait fort longtemps.
D'ailleurs si elle voulait distinguer un
peu mieux l'allure du batiment, il fallait qu'elle s'en approche. La curiosité
était tellement ancrée en elle, qu'elle se surprit au bout
du septième jour à se promener nonchalemment dans ce qui
devait être autrefois un somptueux jardin.
Durant sa promenade, qui prenait plutôt
des allures d'exploration tant la végetation était dense,
Alyssa découvrit les restes d'une gigantesque verrière
attenant à la maison, ainsi qu'une petite masure sur un coté.
La verrière semblait immense, mais les éclats de verres apparents
lui firent rebrousser chemin rapidement. Elle n'était pas équipé
pour ce genre d'aventures, se dit-elle sagement, en pensant aux gants et
aux bottes de jardinier qu'elle avait laissé à sa maison...Demain
peut-être...
La mâsure, était probablement
un abri pour le jardinier pensa-t-elle. Il devait y avoir beaucoup de travail,
car cela faisait plusieurs fois qu'elle se perdait tant le terrain semblait
étendu. Mais bien sûr il lui suffisait de marcher un peu en
levant les yeux et de manière quasi-instinctive elle retrouvait
les toitures de la demeure dans son champ de vision .
Elle était extrêment prudente
dans sa marche car elle gardait bien en mémoire que la maison avait
vraiment l'air bâtie avec un coté donnant dans le vide...Quelle
chose étrange !
Et elle n'avait pas du tout l'intention
de finir en bas de la falaise...
C'est ainsi qu'elle arriva devant la grande
porte. Là aussi, le temps avait laissé ses traces et l'aspect
du perron laissait présager de la vétusté de l'intérieur...Quoique
en y regardant de près elle fut surprise par le bon état
de la porte et des gonds.
Si seulement...
Elle tendait la main lorsque elle entendit
un bruit derrière elle...
Elle poussa un cri de stupeur et se retourna
tremnlante, le coeur battant la chamade. Stupide...voilà ce qu'elle
était !
Elle reprit son souffle tranquillement,
allons voyons ma fille ! Un chat, ou un chien errant tout au plus...
Ha ! le sourire revint sur ses lèvres,
et l'assurance tranquille dont elle avait fait preuve jusqu'à présent
était revenu.
Elle plissa les yeux et regarda par terre
: nulle trace. Mais en les relevant elle aperçut un ciel noir qui
semblait avancer rapidement !
C'est ce qu'il y d'embêtant avec le
bord de mer, se dit-elle, on ne sait jamais quel temps prévoir...
Sur ce elle prit le chemin de retour. Deux
cents mètres plus loin, elle se retourna une dernière fois,
pour contempler la vieille demeure sur le bord de la falaise.
C'était une maison à étages,
grande, très grande, avec une tour pour écorcher les nuages
bas. L'aile donnant sur la mer semblait avoir été bigrement
endommagée, mais le reste était intact. Les fenêtres
était fermées par de vieux volets en bois, style persienne.
Et elle n'avait vu qu'une seule entrée : la grande porte.
De quel époque était-elle
? , elle avait l'air tellement ancienne, tellement fragile et pourtant
elle semblait avoir si bien résisté à l'érosion
du temps.
C'était décidé. Demain
elle reviendrait plus équipée. Après tout sa maison
pouvait bien attendre, elle était en vacances, et n'avait pas cesser
de travailler depuis son arrivée..." |
Malgré une marche forcée,
la pluie commença à tomber à grosses gouttes bien
avant qu'Alyssa eut atteint sa maison.
Et c'est avec soulagement qu'elle rentra
se changer. Sous l'effet de la pluie son t-shirt léger avait tendance
à mouler de gracieuses formes et à défaire sa
coiffure. Choses bien entendu, impropres
à son bien-être. Elle n'avait jamais aimé ce genre
d'exhibition, d'ailleurs réflexion faîte, sa tenue négligée
était sans doute une conséquence de sa solitude.
Elle n'avait pas eu de visite depuis une
semaine, et les seules personnes qu'elle avait rencontrées étaient
des gens qu'elle était allée rendre visite.
Apparemment l'endroit était plus
que paisible. Et c'est bien ce qu'elle avait recherché !
Alyssa se retrouvait donc devant la glace
qui ornait l'un des murs de la salle de bain. Une fois le tee-shirt et
le soutien gorge enlevés, elle se mit en quête de quelque
chose de plus approprié. C'était la première fois
qu'elle prenait conscience de son corps.
Certes elle avait toujours eu la passion
des sous-vêtements de luxe, mais elle n'avait jamais fait réellement
attention à cette petite poitrine gracieuse qui sont l'atout de
bien des femmes. Petites pointes graciles qui tendait vers l'extérieur,
comme s'ils étaient fiers de leur tenue. Elle se dépêcha
de les recouvrir d'un tissu doux et délicat orné de dentelles.
Il suffit d'une fois, pensa-t-elle en rougissant pour que quelqu'un frappe
à ma porte. |
|
Ce soir là, la nuit vint plutôt
que prévue, probablement dû au mauvais temps. On n'y voyait
guère à l'extérieur et il faisait bon avoir un toit
au-dessus de la tête. Le temps idéal, pensa Alyssa, pour que
je me mette à jour dans mon courrier !
C'est curieux, voilà une semaine
que je suis ici, et décidément la famille ne me manque pas
vraiment pas.
Enfin...
Après avoir diné, elle s'installa
dans le bureau pour commencer sa correspondance.
C'était la seule pièce de
la maison qu'elle avait décorée avec des portraits de la
famille, quelques photos encadrées aux murs, mais aussi des dessins
au sépia car Alyssa était une artiste.
Elle adorait dessiner. Depuis toute petite
elle avait toujours fait preuve d'un don extraordinaire pour le dessin,
don qui avait été peu à peu étouffée
par ses études. Mais lorsqu'elle avait un peu de temps devant elle,
elle s'enfermait pour dessiner. Ainsi, au fil des ans, elle avait quand
même réussi à développer son talent.
Maintenant qu'elle était chez elle,
elle avait eu le courage et la satisfaction de mettre à jour les
portraits qu'elle avait le mieux réussis.
Parmi ceux-ci, le portrait de son père
était probablement le plus vivant. Avec son air sévère,
son regard perçant, c'était comme s'il était prêt
à surgir pour la réprimander.
Ha s'il se voyait. Un sourire se glissa
sur son visage. Dehors le vent était tombé mais la pluie
s'était installée. Alyssa se mit donc à écrire.
Une coupure de courant l'obligea à
sortir une lampe à pétrole. Comme Alyssa était très
prévoyante, celle-ci était en parfait état de marche
et bien remplie. Il lui fallut néanmoins parcourir quelques mètres
dans la pénombre pour atteindre le placard où la lampe était
rangée.
En passant devant une fenêtre, elle
vit, se découpant sur l'horizon, la silhouette de la maison sur
le bord de la falaise. Un frisson la parcourut. Quel aspect sinistre...
Bah ! C'est sûrement dû au temps et à la fatigue. Allez
! Je finis ces quelques lignes et je vais dormir !
De retour à son bureau avec la lampe,
elle termina son récit sur la découverte de son voisinage
et de l'étrange masure qui jouxtait son terrain. Les politesses
d'usage, un timbre sur l'enveloppe posée sur le bord du bureau .
Tiens donc, il faudrait que je me renseigne sur la poste...
Le sommeil fut prompt à venir, mais
il fut aussi très agité !
Au lendemain matin, les draps étaient
entortillés autour d'elle, comme un cocon, un peu à la manière
d'une toile d'araignée. Elle avait de vagues souvenirs.
Alyssa était à la fois soulagée,
fatiguée mais également assez excitée. Cela lui rappela
la première nuit qu'elle avait passée chez ses parents, juste
après la découverte de l'amour.
Elle avait fait ça vite, dans la
remise au fond du jardin de ses parents. Dans le noir, pour ne pas crier
elle s'était elle-même bâillonnée...
Pour le reste elle avait laissé faire
son amant.
Quel souvenir, quel plaisir aussi ! Sa famille
n'avait pas compris son retard, et un semblant d'excuse vaguement formulé
lui avait valu la réprobation du clan familial.
Ses fesses en avaient d'ailleurs gardé
un cuisant souvenir, la badine paternelle étant un excellent moyen
de ne pas oublier la politesse et les usages de maison.
Quelques fruits frais feraient l'affaire
ce matin, et c'est avec hâte qu'elle s'habilla.
Elle avait vite fait le tour des vêtements
et du matériel nécessaires.
Hélas, elle était équipée
bien légèrement pour une exploration, et la seule idée
de parcourir cinq kilomètres pour aller chercher de l'aide la dissuada
rapidement.
Voici donc Alyssa sur le chemin de la demeure...
Au pied des bottes un peu large, bottes d'hommes qui tenaient au pied grâce
à trois paires de chaussettes enfilées les unes par-dessus
les autres. Par-dessus ses dentelles habituelles, un pantalon de tissu
grossier: pas question de porter une jupe tant le jardin est broussailleux,
et par-dessus, une veste large en toile grossière.
Heureusement que personne ne la verrait,
elle ressemblait à un épouvantail mal fagoté. Sur
le chignon un chapeau de jardinier, et dans le sac en bandoulière,
des gants pour rosier, un petit taille-buisson, une gourde, un petit en-cas
et un petit parapluie. Dans ses poches, un foulard, quelques mouchoirs
et un petit canif.
Elle récupèra un long bâton
de marche et la voilà partie. "Cette fois je rentre à l'intérieur" |